Le métier de nos parents | Gisèle, artisan fleuriste, une Couturière de la Fleur passionnée !

Chaque mois, le Blog pour Filles vous fait découvrir un métier. Pas n’importe lequel : celui de nos parents ! Qu’ils soient instituteurs, avocats, médecins, artisans, commerçants, agriculteurs, militaires, artistes, nous vivons leurs métiers à travers eux. Nous baignons dans leurs univers dès l’enfance et nous connaissons les avantages et inconvénients de leurs professions. Et, même s’il est plus rare aujourd’hui qu’il l’était hier, quelques-unes d’entre nous finissent par épouser la vocation familiale.

Vos parents ont une profession particulière ou un métier qui les passionne ? Partagez-le avec nous ! Racontez-nous le métier de vos parents à travers des souvenirs marquants, des anecdotes. Donnez-nous votre vision de leur métier et faites-nous part des problématiques qu’ils rencontrent dans l’exercice de leur profession. Enfin, dites-nous si vous avez suivi le même chemin qu’eux ! (N’hésitez pas à envoyer un mail à [email protected], votre anonymat sera respecté si vous le souhaitez). Voici l’occasion de découvrir de beaux métiers, et les coulisses de métiers que l’on croit connaître mais que l’on ne connaît pas si bien !

Pour le premier article de la série, je prends la plume et l’emploi du « je ». Exceptionnellement. Ce, pour parler du métier de ma mère : artisan fleuriste passionnée.

Une enfance fleurie

Pour débuter cet article un peu particulier, j’ai envie de citer un petit extrait d’une jolie chanson d’Amélie les Crayons « Le Linge de nos mères » : « Dans les jardins de nos mères, y’a des fleurs qui dégoulinent, y’a des roses, des primevères, du lin et de la glycine ». J’ai grandi dans les fleurs. A peine âgée de quelques mois, blottie dans mon koala, j’accompagnais ma mère au célèbre marché de Rungis où elle se rendait chaque semaine pour choisir les plus belles fleurs pour ses clients. J’ai fait mes premiers pas dans son premier magasin de fleurs, du joli nom : « Le Jardin de Julie ». J’ai passé mes étés dans les jardins fleuris de mes grands-parents qui sentaient bon le lilas, les roses et les pivoines, me cachant entre deux buissons d’hortensias roses. La Saint Valentin et ses amoureux, le 1^er mai et son muguet, la Fête des grands-mères et ses jonquilles, la Fête des mères et ses jolis bouquets, la Toussaint et ses « fleurs d’or » les chrysanthèmes, Noël et ses odeurs de sapin,… Au fil des années, j’ai vu défiler toutes ces jolies fêtes dans le magasin de ma mère, entraînant son lot d’émotions et d’anecdotes. Un souvenir marquant ? Le jour où des Arlésiennes, en habits traditionnels, ont défilé les unes après les autres dans sa boutique pour venir chercher leurs bouquets de fleurs, pour la fête du village. Mon bonheur annuel ? Recevoir mon petit bouquet de violettes. J’aime particulièrement la saison estivale et ses beaux mariages. Chaque semaine, je rêve devant les bouquets de mariées, tous plus beaux les uns que les autres… De vrais bijoux uniques et personnalisés. Chaque semaine, je me régale devant les étals de pivoines, de roses, d’orchidées, de callas, d’hortensias… Ce que j’adore plus particulièrement ? Voir les larmes d’émotion d’une mariée recevant son bouquet de mariée, les petits « oh », « ah » de bonheur des mariés découvrant leur salle de réception fleurie, avec soin et passion. Dans ces moments-là, je suis fière de ma mère. Une magicienne aux doigts d’or. Parfois, c’est plus difficile. Lorsque l’on voit arriver des enfants ou des parents endeuillés. Savoir les accompagner dans leur douleur, et faire honneur à l’être aimé avec des belles fleurs, est l’une des facettes délicates du métier. Encore plus lorsque l’on fleuri le départ de l’un de nos proches. Dans un magasin de fleurs, la vie et la mort se côtoient régulièrement. Voici quelques années, ma mère a dû réaliser un joli cœur de roses rouges pour le départ de son oncle ainsi qu’un bouquet de mariée en forme de cœur et en roses rouges. Ce, le même jour. Ce jour-là, j’étais admirative de sa force et de son courage !

Une fleuriste passionnée

Depuis plus de 30 ans, ma mère est une fleuriste passionnée, diplômée et autodidacte à la fois. Au fil des années, et face à l’évolution de son métier, elle s’est spécialisée dans le mariage et l’événementiel. Elle a fait ses premiers pas dans le magasin de fleurs de ses parents, avant de devenir l’apprentie de l’un des plus grands fleuristes de sa région et d’obtenir son CAP. Pendant des années, elle a travaillé pour différents patrons, avant d’ouvrir sa propre enseigne, il y a dix ans : « Ambiances & Fleurs ». Après avoir tenu une boutique pendant quelques années, elle l’a fait évoluer en atelier-showroom, ouvert sur rendez-vous, et spécialisé dans l’événementiel et le mariage : « Couturière de la Fleur ». Telle une caverne d’Ali Baba, celui-ci regorge de petits trésors : de beaux vases modernes et des objets chinés depuis des années, appréciés par les amoureux du vintage ! Un joyeux bazar dans lequel on se sent bien.

Une profession idéalisée & ses difficultés

Les fleuristes passionnés et professionnels, comme ma mère, font face à de nombreuses difficultés dans l’évolution de leur métier. D’abord, à cause d’une concurrence multiple et déloyale : les grandes surfaces, les chaînes  « discount », les traiteurs, les organisatrices de mariage,… Nombreuses sont les raisons  pour un fleuriste de se battre pour défendre son artisanat. Ensuite, à cause du prix de plus en plus élevé des fleurs et des matières premières à l’achat. Effet du prix des transports et de l’essence. Effet de certaines dates « spéciales ». Effet des saisons. Le prix d’une même fleur peut varier d’une saison à l’autre. Puis, les fleuristes font face à la vague des « blogs mariage ». Des blogs qui inspirent aussi bien qu’ils peuvent nuire à certaines professions. Pour la plupart, ces blogs sont étrangers et créent des envies à des futures mariées. Envies non réalisables pour plusieurs raisons. Budgets différents, climats différents, cultures différentes. De même, parfois, certains blogueurs peuvent donner des conseils, sans connaître réellement le sujet. Conseil suivi par de nombreuses futures mariées. J’ai vu, plusieurs clientes dans ce cas, défiler dans le magasin de ma mère. Seule une professionnelle comme elle saura vous conseiller sur la décoration appropriée à votre lieu de réception ou à votre thème. Seule une professionnelle comme elle saura vous conseilleur sur la saisonnalité des fleurs. Seule une professionnelle comme elle saura vous dire qu’elles sont les fleurs à ne pas utiliser à cause des allergies ou de leurs symboliques.

Bien souvent, le métier de fleuriste est idéalisé et réduit à : « travailler dans une jolie boutique bien propre, être entouré de fleurs, et faire de beaux bouquets ». Or, fleuriste, comme beaucoup d’autres, est un métier difficile : le froid en toute saison, le poids des nombreuses charges à soulever, les mains abîmées par les coupures régulières, les horaires, les allergies, … Préparer un mariage, ne consiste pas pour une fleuriste, à faire de jolis bouquets : devis nombreux, commandes de fleurs, le marché aux fleurs tôt le matin, la préparation des fleurs, composer, livrer, mettre en place, désinstaller, stocker du matériel,…

Moi, fleuriste ? Non merci !

J’admire le métier de ma mère, son réel talent, sa force d’abnégation et sa générosité. Un métier dans lequel, elle accompagne les émotions, les joies et les peines de ses clients. Mais, en tant que témoin des problématiques qu’elle rencontre au quotidien, et de la difficulté de cette profession, je n’ai jamais envisagé de devenir fleuriste à mon tour. Bien souvent, on me demande pourquoi ? J’aime les fleurs, je suis admirative du travail de ma mère ou encore de Jeff Leatham, mais je vous donne cet article en réponse ! Seuls de vrais passionnés peuvent encore l’exercer.

Julie DERACHE

Toutes les photographies présentées sont les créations de Couturière de la Fleur, elles ne sont pas libres de droit. © Julie Derache Photographies.